…Le feuilleton odorant et les effets co-latéraux de la Distillerie Douence à Saint Genès de Lombaud en Gironde…
Afin de recueillir l’avis du public sur la demande de régularisation administrative d’autorisation d’exploiter une distillerie sur les communes de Saint Genès de Lombaud et Haux, une enquête publique a été ouverte du 17 mai au 18 juin inclus. Le dossier d’enquête publique( étude d’impact et registre) était uniquement consultable dans les mairies de Saint Genès de Lombaux et de Haux, (siège de l’enquête)
Pour ce qui est des communes concernées également par cette enquête publique et considérées comme les plus impactées par les nuisances diverses générées par ladite distillerie soit : Baurech, Capian, Créon, Langoiran, Madirac, Sadirac, Saint Caprais de Bordeaux, La Sauve, Tabanac, Le Tourne…ce qui représente une population de 19.200habitants (pratiquemen équivalente à celle de la Ville de Lormont) elles n’ont eu droit ni à l’étude d’impact, ni au registre permettant l’expression des habitants , ce qui obligent ces derniers soit de se déplacer à à la mairie de Saint Genès de Lombaud (347 habitant) soit dans celle de Haux (781 habitants) !
En Entre-deux-Mers, le tronçon de la départementale 20 qui va de Langoiran à Créon suit le riante vallée du Lubert, petit affluent de la Garonne. L’automobiliste qui emprunte la route, pour peu qu’il roule tranquillement, peut admirer un paysage bucolique, verdoyant, jusqu’à l’instant où il est assailli par une forte odeur nauséabonde, signe indubitable que la route longe « le fief de la famille Douence » dont l’épicentre est la distillerie qui occupe, au fond du vallon, quelques cinq hectares. Comme il est difficile de se boucher le nez et de tenir son volant, le conducteur accélère pour fuir au plus vite en retenant sa respiration !
C’est cette distillerie qui fait actuellement l’objet d’une enquête publique sur les communes environnantes représentant quelques 19.000 habitants qui supportent directement, peu ou prou, les émanations et miasmes provenant de l’activité de l’entreprise qui a pour objet essentiel la valorisation des sous produits de la vignes, marcs de raisin, lies de vins etc…
A l’origine, avant 1947, la distillerie n’avait qu’une activité itinérante, se déplaçant directement chez les viticulteurs. Puis l’activité a été sédentarisée sur le site actuel où les premiers locaux industriels occupaient le chai d’une ferme construite en 1800 et dont le bâtiment principal sera détruit en 1950 pour laisser places à des structures de production plus adaptées au développement de l’entreprise.
Aujourd’hui, la distillerie Douence est devenue l’une des plus importantes distilleries privées de France (si ce n’est la première?). Elle reçoit maintenant les matières premières viticoles de quatre départements : la Gironde (bien naturellement) mais aussi celles de Dordogne, du Gers et de la Charente, avec ce que cela induit comme flux de camions au moment des vendanges et toute l’année comme effets néfastes :, nuisances olfactives, environnementales, et dangerosité des installations…compte tenu de l’importance des tonnages à traiter, de la situation de la distillerie sur un site géographique devenu inadapté, dans une région de plus en plus urbanisée étant donné sa proximité avec Bordeaux, mais également en raison des « négligences avérées » des dirigeants Douence à respecter les différentes législations afin que cette installation classée soit tout à fait en conformité. (Voir en suivant article intitulé Echos judiciaires du 1er juillet 2002)
Depuis plus de deux décennies maintenant, les associations de protection de l’environnement se sont mobilisées et continuent aujourd’hui telle Label Nature pour faire en sorte que la loi soit respectée et s’insurgent contre la politique du fait accompli des dirigeants qui poursuivent le développement de l’entreprise à leur guise , s’occupant éventuellement de régulariser ensuite les manquements à la loi !
Ce qui ne manque pas aussi d’étonner les citoyens du « laxisme avéré » de l’administration, à qui il est arrivé de prendre des arrêtés non suivis d’effets ! Est-ce parce que la famille Douence représente une sorte d’oligarchie locale ? Le maire actuel de Saint Genès de Lombaud (commune d’implantation de la distillerie) s’appelle Jean-Michel Douence. Premier magistrat de la commune il a donc le devoir de faire respecter la loi et de faire en sorte que la santé, le bien vivre de ses administrés soit l’une de ses préoccupations majeures ! Mais il ne peut être juge et partie puisqu’en dehors de son mandat de maire, il est aussi président directeur général de la distillerie. Il est également, par ailleurs, directeur général de la holding « Moulin du Lubert » créée en 2015, sise à la même adresse que la distillerie, au capital de 6.846.528 euros, avec un seul dirigent, lui-même. Le chiffre d’affaires, les résultats de cette holding, ainsi que le nombre d’effectif ne sont pas communiqués (source Site Internet : www.manageo.fr).
Le fief Douence comprend aussi par ailleurs les propriétés viticoles : Château Peneau et Domaine de Haute Sage et là dans la famille Douence vous trouvez la mère, Dany, gérante – le père Michel, œnologue- le fils Jean-Davy , chef de culture – le frère du précédent : Dimitri, responsable commercial- la sœur Emilie, chargée de communication . (source : Site Internet-www. château Peneau, « Notre famille »)-
Il est intéressant de consulter le site Internet émanant de la distillerie (www.distilleriedouence.fr) qui « cyniquement » démontre tout au long combien les dirigeants sont soucieux de préserver l’environnement et de s’inscrire dans le développement durable. Il est fait état également des modifications et aménagements historiques apportés à l’entreprise pour se moderniser, bien naturellement en oubliant de préciser que ceux –ci n’ont été réalisés qu’après avoir été contraints par quelques arrêtés comminatoires du préfet suite aux actions et quelques recours judiciaires des associations !
A remarquer d’ailleurs que l’enquête publique en cours porte sur la régularisation administrative d’autorisation d’exploiter une distillerie sur les communes de Saint Genès de Lombaud et Haux (33).et dans le paragraphe introductif « Principales caractéristiques du projet » rappelle l’historique des décisions administratives : « La société DOUENCE est spécialisée dan la production d’alcool par distillation des marcs, des lies et des vins.
L’entreprise fondée en 1947 sur le site actuel de Saint Genès de Lombaud a été autorisée à exercer son activité de distillation successivement par les arrêtés préfectoraux du 23 juin 1975, du 20 août 1985, du 18 octobre 2001 et du 24 novembre 2003
En raison d’une irrégularité dans la procédure d’autorisation, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné dans son jugement en date du 22 avril 2010 :
- L’annulation des arrêtés préfectoraux des 18 octobre 2001 et 24 novembre 2003(le 2 juillet 2002 le Président directeur général d’alors Michel Douence(mais aussi maire de la commune de Saint Genès de Lombaud) et la distillerie en tant que personne morale étaient condamnés par le tribunal Correctionnel de Bordeaux – voir article Echos judiciaires-)
- Le dépôt d’un nouveau dossier de demande d’autorisation couvrant les extensions auxquelles la Société Douence a procédé depuis les arrêtés des 23 juin 1975 et 20 août 1985.
- De prendre si nécessaire des prescriptions provisoires en attendant l’achèvement de l’instruction du nouveau dossier de demande.
Le dossier déposé le 4 décembre 2015 s’inscrit dans ce contexte : il a pour objectif de permettre la régularisation administrative des activités du site, notamment des évolutions ayant eu lieu depuis 1975 et 1985, et d’aboutir à l’encadrement des installations exploitées par des prescriptions techniques intégrant les dispositions provisoires fixées par l’arrêté préfectoral du 3 février 2011.
Le dossier déposé le 4 décembre 2015 présente les évolutions des activités du site au regard des arrêtés de 1975,1985 et 2011.Il en ressort les modifications :
- La production d’alcool entre 2011 et 2014 a augmenté d’environ 160%. Ceci constitue une modification significative, toutefois cette activité reste soumise au régime d’enregistrement.
- La production d’amendement organique a progressé dans les mêmes proportions. L’activité est soumise à autorisation.
- Le stockage d’alcool a notablement augmenté, passant de 2,90m3 autorisé dans l’arrêté préfectoral de 1985 à un volume de stockage actuel de 334m3.
Où l’on voit par là que pendant ce laps de temps , de 1975 à aujourd’hui, soit 41 ans, une génération d’habitants aura eu, elle, le temps de subir et de supporter vaille que vaille sur son environnement et sa qualité de vie les nuisances diverses de la distillerie, les effets éventuels sur la santé, sur la biodiversité, sur la qualité de l’eau et du Lubert et des nappes phréatiques… Il est grand temps que cela change ! Colette Lièvre.
Lettre aux élus du Collectif des riverains et de l’association Label nature.
Le collectif de riverains et l’association Label Nature dont l’objet est la protection de l’environnement et du cadre de vie des communes environnantes de Saint Genès de Lombaud ont envoyé le courrier suivant aux élus concernés par cette enquête publique.
Nous le publions pour permettre aux lecteurs d’avoir une meilleure compréhension des enjeux car il met en évidence les éléments techniques, physiques, chimiques présentant un ensemble de risques pour l’environnement et la qualité de vie, voire la santé de la population impactée.
Mesdames, Messieurs les Elus,
Objet : Avis de votre commune sur le dossier soumis à enquête publique pour autoriser l’exploitation de la Distillerie Douence.
La nouvelle autorisation-régularisation demandée par la SAS Douence est bien plus qu’une procédure administrative : c’est en fait l’avenir de tout un territoire qui se joue avec cette autorisation.
La S.A.S Douence a démarré son activité artisanale en 1947. Aujourd’hui son activité répond toujours à un besoin local de traitement des déchets viticoles. Cependant, ses augmentations de production (160% de 2011 à 2014 : traitant les déchets de 4 départements) qui en font l’une des plus grosses distilleries de France ne font-ils pas éclater le cadre étroit de son implantation ? L’autorité environnementale soulève d’ailleurs dans son avis sur ce dossier de nombreuses réserves.
12 communes limitrophes de la distillerie, dont la vôtre, sont amenées à formuler un avis sur ce dossier. Vous devrez décider si une régularisation administrative de l’exploitation est souhaitable en l’état.
Fumées (cf.E.I.chap.IV-1-4 et IV-1-5 p.48 à 52-E.I. Annexe 6)
- Rejets atmosphériques annuel cumulés : 90,93 tonnes soit 402 kg par jour (Oxyde d’azote, Oxyde de soufre, Poussières (au-delà des valeurs limites) COV canalisés et diffus (jusqu’à 4 fois le taux réglementaire sur la chaudière de 8MW)
- Rejets non additionnés faute d’analyses : Dioxines, Furanes, HAP, résidus de pesticides, etc…
- En plein régime les installations de combustion émettent pour certains polluants, plus que l’incinérateur Astria
Dangers (cf. Etude des dangers chapitre 1.4 annexe 4) (cf.E.I.IV.1.5. p.52)
- 4940hl d’alcool stockés sur le site. Près de 55000 tonnes de produits inflammables et combustibles.
- Le danger de l’explosion d’une cuve d’alcool est considéré comme important
- Le danger d’explosion de plusieurs cuves d’alcool et d’un incendie généralisé n’est pas envisagé ( ?…)
- Absence de plan d’évacuation d’urgence des habitants
- Absence de vérification annuelle de l’étanchéité de la canalisation de gaz naturel.
Risques de contamination de la nappe phréatique cf.carte BRGM- Avis 2016-000142. Chap.II.2.1.P4 –forage géologique commune de Haux du 23.12.1996.)
- Lagune implantée sur une formation géologique perméable.
- Etanchéité démontrée sur une seule des 4 lagunes.
- Lagunes situées à – 20mètres au-dessus de la nappe phréatique.
- Compétence obligatoire des Communautés de communes dès 202 pour l’eau et l’assainissement.
Santé publique (réunion publique du 26/05/2016)
- Suspicions de maladies graves de cause environnementale plaidant pour une enquête sanitaire.
- A moins de 2km de l’usine : 3 écoles( Saint Genès de Lombaud, Madirac et Haux) et une crèche (Madirac)
- 200 personnes dans une zone à forte croissance démographique touchées par cette enquête.
Nuisances olfactives (cf Avis 2016-000142. Chapitre II.2.3. p.5)
- Absence d’actualisation de l’étude olfactométrique datant de 2007.
- Absence de suivi de l’impact des odeurs.
- Absence de caractérisation des sources olfactives (bassin de prétraitement, stockage de marc, etc…)
Questions :
- Afin de prévenir l’ensemble des risques liés à la distillerie Douence ne faut-il pas demander à l’administration, avant toute autorisation, une vérification des autocontrôles effectués par la distillerie ?
- Après autorisation (éventuelle) un contrôle permanent et indépendant des rejets atmosphériques de distillerie n’est-il pas souhaitable
Rappel: Application de l’article R.512-7 du code de l’environnement:
1.« Lorsque que l’importance particulière des dangers ou inconvénients de l’installation le justifie, le préfet peut exiger la production, aux frais du demandeur, d’une analyse critiques d’éléments du dossier justifiant des vérifications particulières, effectuées par un organisme extérieur expert choisi en accord avec l’Administration. La décision du préfet d’imposer une analyse critique peut intervenir à tout moment de la procédure. Elle n’interrompt pas le délai prévu à l’article R.512-14. Lorsque l’analyse critique est produite avant la clôture de l’enquête publique, elle est jointe au dossier
- Mise en place d’une station AIRAQ destinée à produire l’enregistrement en temps réel des rejets atmosphériques de la distillerie…d’un comité de suivi…etc, .
Échos judiciaires. Il y aura bientôt 14 ans!
En date du 1er juillet 2002, le Tribunal Correctionnel de Bordeaux a rendu le jugement suivant à l’encontre de la Distillerie Douence située sur la commune de Saint Genès de Lombaud et de ses dirigeants Michel et Bernard Douence. Ce dernier, directeur général de la société, est relaxé des poursuites.
Michel Douence, président directeur général de la société est déclaré responsable des faits qui lui sont reprochés : à savoir pollution du cours d’eau du Lubert, au mépris des mises en demeure de l’Administration (pas moins de 22 arrêtés préfectoraux depuis 1985 non respectés !) et en répression est condamné à une amende de 40.000 euros pour le délit ainsi qu’une amende de 2000 euros pour une contravention. Cette condamnation doit être publiée dans le journal Sud Ouest toutes éditions et affichée dans l’entreprise.
La Société Distillerie Douence en tant que personne morale est condamnée à une amende de 40.000 euros ainsi qu’à deux ans de mises sous surveillance judiciaire.
Il est fait de droit à la constitution de partie civile présentée par l’association Vivre en Entre-deux-Mers. Les prévenus sont condamnés à payer à l’association la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts outre 1000 euros sur le fondement et disposition de l’article 475.1 du code de procédure pénale. (Sources Les Cahiers de l’Entre- deux –Mers, N°52 septembre-octobre 2002.)
Une pétition est également en ligne sur www. Change Org qui sera remise au Préfet et qui dit en substance : « Je m’oppose à l’autorisation administrative de la distillerie Douence en l’absence de garanties basées sur des analyses indépendantes, complètes et actualisées des émissions polluantes : fumées, odeurs, bruit, lumière, rejets dans les sols, la nappe phréatique, les cours d’eau.
Je demande une étude sanitaire préalable, une évaluation quantifiée des risques d’accident et des trafics routiers induits par l’extension de l’entreprise. »
Suite à l’article du Canard Enchaîné du 16 nov., qui a mené à votre article, il apparaît dans votre description et dans les A. P. de la base des Installations Classées, qu’il y a une priorité entre toutes qui doit est respectée, c’est que la distillerie doit fonctionner, et même augmenter sa capacité de production, et de pollution .. n’est ce pas ? C’est également ce qui a prévalu dans le rejet du référé concernant l’autorisation d’exploiter de ERENA à 44 400 Rezé. Soit, dit la justice, il y a irrégularité, en effet la commune de St Herblain ( dans le périmètre des 3 km) a été oubliée dans l’enquête publique, le référé déposé aurait dû entraîner l’arrêt des travaux de la chaufferie bois – gaz / centrale gaz et l’annulation de l’autorisation d’exploiter. Sentence du 18 nov 2016, du T.A. saisi en référé : ” mais la suspension porterait une atteinte grave à l’intérêt général caractérisé par la production de chauffage pendant l’hiver et aurait un impact économique non négligeable. ” voir sur : http://www.centrale-californie.com/?page_id=871
Mars 2022.
J’habite en Charente Maritime, à plus de 40 km à vol d’oiseau de la distillerie Douence et suis de plus en plus régulièrement incommodée par ses odeurs nauséabondes. Quand les pouvoirs publics vont-ils mettre un terme à cette situation ?!