“Les Menuts”

Posté le 02/11/2018 dans Les Gens d’ici.

Il est des lieux que l’on aime ainsi que des personnes !  Il arrive que l’on découvre qu’ils le méritent !

Ainsi mon collège technique bordelais, situé à l’angle le la rue des Menuts et de la rue Permentade, au cœur du quartier Saint Michel.

Je le connus à l’aube de mes quinze ans. J’allais y passer trois ans, à cet âge ce sont des années qui en valent dix ! Ce temps où se déplient les ailes d’une encore enfant à une presqu’adulte. Nous y attendait une équipe de professeurs bienveillants, conscients plus que nous que ces trois années de collège étaient la chance que nous offrait la vie d’obtenir un statut social, un métier.

Durant trois ans, hormis le but final du CAP de comptabilité, de sténographe, ou de couture, nous y tressâmes  des liens d’amitié et pour certains  d’amour. La vieille bâtisse résonnait de nos cavalcades en son escalier central où nos jeunes mains agrippaient la superbe rampe aux volutes  de fer forgé. Certaines salles avaient conservé les traces du passé, ainsi j’appréciais particulièrement la salle des cours de Français aux murs couverts de miroirs encadrés de boiseries crème. Les cours de dessin,  nous étaient dispensés dans un amphithéâtre tout en haut du bâtiment. Le cours Victor Hugo, tout proche, étalait alors sur ses trottoirs des plants de fleurs et de légumes au long de ses boutiques pour la plupart horticoles. En son centre, ainsi qu’aujourd’hui, trônait la Grosse Cloche, avec en plus, en ce temps là, le grand magasin du même nom. Aux heures de liberté, nous le dévalions tels des poulains lâchés en plein champ vers le centre de Bordeaux, ses lumières, ses vitrines, sa rue Sainte Catherine.

Comment oublier de tels lieux ! Une part de nous, diaphane et ténue, à l’instar de ces fils d’araignées  dans les herbes, y subsistent.

Bien des années plus tard, nos vies accomplies, nous retournâmes rue des Menuts. La bâtisse était vacante, n’était plus un collège, avait abrité des squatteurs,  connu des drames ! Le lieu était interdit, déclaré dangereux, vétuste.

Puis un jour mon amie de collège sut qu’un projet était en cours pour « nos Menuts » et ce, par l’organisme où elle avait travaillé toute sa vie. Elle connaissait Dominique Careil, responsable des travaux en cours !

Alors Monsieur Careil ouvrit pour nous  la porte par laquelle nous entrions autrefois ! Les choses avaient bien changées, la classe de Français et l’amphithéâtre n’étaient plus ! Mais subsistaient presqu’intacts l’escalier monumental, le réfectoire et surtout la cour avec son arbre tutélaire qui accueillit tant de confidences !

Nous apprîmes par Dominique Careil et aussi par la plaque retrouvée lors des travaux et installée sur le mur d’entrée que depuis ses débuts cette bonne maison avait été lieu d’accueil. Du XVIIème où la communauté des filles de la charité hébergeait malades et pauvres filles à notre collège connu puis lycée pour enfin devenir un lieu pour les anciens combattants migrants et des jeunes travailleurs  en formation.

Il y a peu nous assistâmes à l’inauguration de la résidence Mohamed Mechti    :

«  Dans le quartier Saint-Michel à Bordeaux, Aquitanis vient de livrer la résidence sociale intergénérationnelle Mohamed Mechti. Au terme d’un remarquable travail de réhabilitation,. » (notes Internet : aquitanisphère)

Après plusieurs années de fermeture, l’ancien lycée professionnel de la rue des Menuts situé au cœur du quartier Saint-Michel, est à nouveau un lieu de vie consacré désormais à l’accueil d’anciens combattants migrants et de jeunes de 18 à 30 ans en situation d’emploi et en formation.

Deux années de chantier ont été nécessaires à Aquitanis pour rénover de fond en comble ce lieu et le transformer en une résidence sociale intergénérationnelle qui porte le nom de Mohamed Mechti *. Une opération remarquable, fruit d’un travail collaboratif avec la Région Nouvelle Aquitaine et la Ville de Bordeaux.

L’aménagement des lieux a été pensé afin de favoriser les contacts intergénérationnels. Outre ses 49 logements modernes et confortables (T1 et T1bis) conçus de façon à ce que les gens puissent se retirer et se sentir bien chez eux, la résidence comporte ainsi des espaces communs dans lesquels anciens et jeunes peuvent se rencontrer, raconter leur vie, leur histoire.

Lors de l’inauguration, Abdelhai Mechti, fils de Mohamed le représenta et nous offrit sa présence.* Ancien combattant marocain ayant servi dans l’armée française pendant la Seconde guerre mondiale. Il est une figure emblématique de la lutte pour l’alignement des pensions des anciens combattants “indigènes” marocains de la Seconde guerre mondiale sur celles des Français. Il s’est éteint en 2010 à Bordeaux à l’âge de 92 ans. »

La boucle est bouclée ! Nous pouvons être tranquilles, le lieu a de nouveau des êtres de bonne volonté pour s’occuper de lui et l’aider dans sa mission d’entraide et d’accueil !  Lysiane Rolland

Photos : Alain Rolland -Jean Marie Dithurbide.

 


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