Savoir raison garder.
Courant juin, Félicité recevait un communiqué de presse émanant conjointement de la Sepanso, de la L.E.A (Landes Environnement Attitude) et de l’ARLP (Alternative Régionale Langon Pau) trois associations de protection de l’environnement, communiqué intitulé : « Autoroute A Langon Pau : du rêve à la réalité » ( reproduit ci-après in extenso.)
« …Pour la troisième année consécutive, les associations SEPANSO Aquitaine, ARLP et LEA ont effectué un comptage pendant 24 heures[1] du trafic de l’autoroute A.65 cette opération a été menée simultanément en Gironde, dans les Landes et dans les Pyrénées Atlantiques.
Le Verdict est sans appel : avec une moyenne de 5436 véhicules dont 494 poids lourds sur les 3 points de comptage, on reste très loin des prévisions initiales qui tablaient sur un trafic global de 10397 véhicules/jour en 2013. Le record de basse fréquentation étant établi dans les Landes avec seulement 4903 véhicules dont 403 poids lourds au sud de Mont de Marsan.
A noter qu’en Gironde où des comptages avaient été opérés en 2012, la baisse du trafic des poids lourds est de : -16,4% en une année alors que les prévisions tablaient sur une augmentation de + de 18,09 pour la même période.
Ce sondage sur 24 heures est suffisamment éloquent pour pouvoir penser que la rentabilité restera longtemps un mirage inaccessible. Il ne suffit pas de construire une autoroute pour que le trafic soit au rendez-vous en dehors des quelques week – ends de ski.
L’A 65 aura été le premier grand projet inutile imposé post Grenelle. Avant de prolonger cette autoroute vers Oloron ou de se lancer dans des nouveaux chantiers autrement plus onéreux et destructeurs que sont les LGV, il est urgent que les décideurs (Etat, élus…) qui l’ont imposée en tirent des leçons… »
Félicité se souvient qu’à l’époque, dès la connaissance du projet de construction de l’A.65 ; les associations représentant la société civile s’étaient fortement mobilisées contre. Elles avaient alors fait valoir et pu démontrer, grâce aux études réalisées par des cabinets indépendants, que cette future autoroute ne serait pas rentable !
Hélas, comme pratiquement toujours, lorsqu’il s’agit d’aménagement du territoire et d’infrastructures lourdes, la société civile ne fut guère entendue, il n’est alors de pires sourds que les élus qui entendent marquer leur pré carré et les services de l’Etat. L’A.65 a donc été construite, avec les résultats que l’on peut constater aujourd’hui !
Quelques années plus tard, les mêmes protestataires sont à nouveau sur le terrain brandissant banderoles, criant slogans, distribuant tracts, communiquant tous azimuts, entraînant dans leur sillage des centaines de manifestants citoyens, mais phénomène plus rare, de nombreux élus : maires, conseillers généraux qui protestent contre le développement prévu des L.G.V. sur le Sud Ouest : L.G.V Bordeaux -Toulouse et L.G.V Hendaye. Ce grand projet ferroviaire à grande vitesse du Sud Ouest a réussi à concentrer contre lui, les plus grandes manifestations jamais vues sur les territoires concernées. Il est contesté non seulement en raison de son coût estimé faramineux. Les 250 kms de la LGV Bordeaux Toulouse a augmenté de 169% en six ans, dépassant les 7,8 milliards d’euros ! Tout cela pour gagner un quart d’heure entre Toulouse et Bordeaux.
Félicité se dit : « Que cela fait cher le quart d’heure et d’ailleurs un quart d’heure pour faire quoi ? Dans une vie qu’est ce qu’un quart d’heure ? Même si par les temps qui courent, il faut toujours courir plus vite ! »
Précisément, c’est bien aussi ce « mythe de la vitesse à tout prix qui prévalait à la fin dernier du siècle» qui est remis en question par les détracteurs du projet, partisans d’un changement radical de politique, bien évidemment, en raison de la crise de la dette publique, des efforts financiers demandés à tous et par conséquent des restrictions budgétaires à tous les niveaux : Etat et collectivités locales ,mais aussi parce que le monde est en pleine mutation avec des réalités socio-économiques, environnementales nouvelles, voire inattendues.
Ce Grand Projet du Sud Ouest de 417 kms de lignes supplémentaires détruira 8000 hectares de terres agricoles, de quoi nourrir 32000 personnes selon l’A D E M E . C’est donc aussi un désastre écologique et humain qui va à l’encontre des prédictions des experts en futurologie qui prévoient une raréfaction des terres agricoles nourricières dans les années à venir.
Ces protestataires ne sont pas les seuls à dire « qu’il est temps de réinventer un autre modèle économique… »
Les Assises ferroviaires de décembre 2011, appelaient l’Etat à mettre en œuvre « Un moratoire » sur tous les futurs projets de L.G.V compte tenu des fortes incertitudes pesant sur leur rentabilité et la course irraisonnée à l’extension du réseau. Les rapports de la Cour des Comptes, du Comité d’analyses économiques, les Commissions parlementaires de l’Assemblée Nationale, du Sénat ne disent pas autre chose. Tous sont convaincus que trop de TGV risque de tuer la S.N.C.F et le système ferroviaire français. Alors que chaque jour 9 clients de la S.N.C.F sur 10 voyagent sur un autre train que le TGV et dans des conditions telles que les retards sur les horaires sont fréquents, la rénovation du réseau existant est devenu une priorité absolue compte tenu de son état de vétusté.
Félicité pense que le dramatique déraillement survenu à Brétigny sur Orge ce 13 juillet dernier en est, peut être, une triste conséquence. Elle se demande aussi si quelques experts ont fait le calcul du manque à gagner pour l’économie française de tous ses salariés qui arrivent en retard au travail, qui accumulent fatigue et stress etc… Aujourd’hui, bien que ne représentant que 7% du réseau ferroviaire total les L G V absorbent à elles seules la quasi-totalité des investissements, ne laissant que quelques miettes pour la rénovation du réseau dit Inter-cité.
Le 27 juin la Commission« Mobilité 21 » a remis son rapport pour un « Schéma national de mobilité durable » qui a remis en cause le précédent Schéma national sur les infrastructures de transport (SNIT) élaboré en 2011 par le précédent gouvernement , évalué à 245 milliards d’euros sur 25 ans ! Intenable en l’état actuel des finances et celles de l’Etat et celles des Collectivités locales.
Il faut savoir raison garder ! C’est ce qu’a compris, semble t-il,la Commission qui a pris en ligne de mire ces trains du quotidien depuis si longtemps laissés pour compte et propose d’offrir aux Français des solutions d’équité sans passer par la case Grande vitesse, au coût prohibitif ! Enfin, au lieu de rêver d’un train roulant à 350 kms à l’heure, plutôt renouveler le matériel roulant des grandes lignes de train d’équilibre des territoires comme : Limoges -Toulouse ou encore Bordeaux- Marseille –Nice, et moderniser les lignes qu’empruntent quotidiennement les Français .
Belle occasion pour qu’une délégation d’une centaine de personnes se rende à la sous-préfecture de Langon pour demander l’arrêt définitif des projets de LGV Bordeaux- Toulouse et Bordeaux- Espagne. De nombreux élus étaient présents : maires, conseillers municipaux, cinq conseillers généraux, un seul conseiller régional. Il est vrai que le grand projet ferroviaire du Sud Ouest est soutenu par Alain Rousset Président du Conseil régional d’Aquitaine, Alain Juppé Maire de Bordeaux, pour l’occasion: tous deux sur la même voie !
Félicité.