Florence Mothe, historienne, romancière …

Posté le 18/05/2013 dans Les Gens d’ici.


Florence Mothe ……

Le Château de Mongenan à Portets (Gironde) a la charme ineffable et indéfinissable de ces demeures historiques du XVIIIème  conservées en état de grâce parce que constamment habitée, et encore aujourd’hui, depuis son édification en 1736 pour le baron Antoine de Gasq, par la dernière de ses descendants. Monsieur le baron fut président du Parlement de Guyenne, fondateur de l’Académie des Sciences, belles lettres et Art de Bordeaux, dont son ami, et quasiment voisin[1], Montesquieu, fut le directeur pendant plusieurs années, jusqu’en 1748 celle de la publication de « L’Esprit des Lois ».

On peut imaginer l’intérêt et la diversité des conversations politico – philosophiques de ces  Messieurs lorsqu’ils se réunissaient à Mongenan, petit comité  auquel s’était joint Jean-Jacques Rousseau, qui réfléchissait, peut être, déjà, à son « Contrat Social », mais pour l’heure s’employait à enseigner la musique à Monsieur Antoine de Gasq et à l’initier aux mystères de la botanique. Jean-Jacques Rousseau, naturaliste, en quelque sorte écologiste  précurseur en son temps, admirateur du grand nomenclatureur d’espèces, Karl von Linné, se sentant chez lui à Mongenan, réalisera un exceptionnel herbier toujours conservé au château. Tout à fait moderniste, il en dessinera le jardin abandonnant les codifications régissant l’ordonnancement des jardins dits à la française. Jardin admirable que l’on peut encore admirer de nos jours !

Près de trois siècles plus tard, Florence Mothe, gardienne et animatrice de cette maison historique, est là dans ce grand salon du château de Mongenan où  l’ensemble du mobilier provient de l’héritage d’Antoine Claude Nicolas de Valdec de Lessart, autre personnage emblématique ayant occupé les lieux et dont il convient d’évoquer quelques épisodes de sa vie, si liés à notre histoire de France.

Le personnage est né le 25 janvier 1761 précisément au château de Mongenan. Fils naturel du baron Antoine de Gasq, il sera appelé à de hautes fonctions au sein de l’Etat : Ministre des affaires étrangères, Ministre de la marine…mais en cette période troublée de la Révolution française les carrières pouvaient être de courte durée : il sera tué à Versailles (le 9.09.1792) lors des massacres de septembre ordonnés par Danton. Il reste au château de Mongenan , dans la partie transformée en musée, le souvenir d’un homme au visage fin représenté en gravure dans un tableau placé en vis-à-vis de celui de son père, le baron de Gasq, qui témoigne de sa ressemblance avec ce dernier.

Assise dans un fauteuil à tapisserie à petits points, dans ce grand salon qui a plus qu’une âme :  de l’esprit… dont Florence perpétue la tradition en racontant l’histoire de ses ancêtres autant dire l’Histoire de France, tant tout y est mêlé.

Chroniqueuse d’hier et d’aujourd’hui (Florence n’a-t-elle pas  été journaliste pendant plus de quarante ans[2]) elle continue à porter sur certains pans de la société bordelaise un regard impertinent, dénonçant une propension naturelle pour ses membres à se diluer dans des considérations brumeuses et souvent critiques envers ceux ou celles qui entreprennent voire réussissent. « Bordeaux est une auberge à grimaces » dit-elle, avec un sourire charmeur et une lueur narquoise dans les yeux . Peut être est-ce l’effet de cette Garonne si proche, dont les flux et reflux incessants, rendent difficile la navigation à contre-courant, contrecarrant l’esprit d’initiative, et entretenant un consensus mou qui a souvent prévalu pour ne pas prendre de décisions.

Florence n’est pas de cette trempe, journaliste, historienne elle est aussi romancière et vient de sortir son dernier ouvrage, ayant pour sujet principal la Franc-maçonnerie en Gironde. Ouvrage qui lui a demandé cinq ans de recherches, et qui rejoint, là aussi, l’histoire de ses ancêtres, celle de Montesquieu, la franc-maçonnerie s’étant implantée très précocement dans le Sud-Ouest. D’ailleurs, le visiteur venant au Musée de Mongenan, peut voir l’unique temple maçonnique français du XVIIIème, précédé du cabinet de réflexion, ouvert au profane, ainsi qu’une collection unique de cordons, tabliers, bijoux documents ,rituels… Cette loge a fonctionné jusqu’en 1898, année de la mort de l’arrière grand-père de Florence. La tradition n’a pu se perpétuer faute d’héritier mâle ! C’est donc sa mère qui a restauré cette loge pour le centième anniversaire de la Révolution française. Toujours cette osmose entre la petite et la Grande Histoire !

Dans ce dernier livre « Lieux symboliques en Gironde. Trois siècles de Franc-maçonnerie à Bordeaux » Florence Mothe dénonce les idées reçues, les légendes racontées : « …le grand mystère restant le fonds de commerce des Francs maçons, ils se sont racontés tellement de légendes… » Dit-elle, rapportant cette histoire à celle de la région et de l’Histoire de France.

Florence Mothe l’affirme, ce qu’elle préfère parmi toutes ses activités, c’est : écrire, et elle a déjà beaucoup écrit !  Auteure d’une trilogie romanesque et historique des Wallenberg : « Si Dieu me manque – Jeux de plaisir- La terrasse des Feuillants » (Ed. Robert Laffont) elle ne saurait être girondine, ancrée dans ce terroir des Graves, sans écrire sur ces vins mythiques qu’elle connaît bien[3], étant elle-même propriétaire outre du vignoble du château de Mongenan, du château Majereau-La Lagune situé à Virelade en appellation Bordeaux et des chais du château Lagueloup situés à Portets. Chais magnifiques, transformé en musée du vin et où sont regroupées toutes les collections sur la vigne et le vin du château de Mongenan. Le musée comprend plus de mille objets, outils, documents, un atelier de tonnellerie ainsi que l’ensemble des instruments de chais datant de la fin du XVIIIème siècle.

Journaliste, historienne, romancière, viticultrice, personnage à facettes, bien enracinée dans la terre de ses ancêtres, bien de son temps mais influencée et habitée par le XVIIIème siècle, ce siècle des Lumières qu’elle raconte au fil des conférences qu’elle donne régulièrement au Château de Mongenan, avec la faconde et le naturel de ceux et celles qui ont de la branche ,Florence Mothe est aussi une épicurienne qui sait parler vignes et faire goûter à ces visiteurs ses vins de terroir ceux de ses différents châteaux viticoles.

Colette Lièvre.

Repères :

Visites commentées du Château de Mongenan du 7 janvier au 31 décembre. Sur rendez-vous la semaine hors saison, de 10hà12h et de 14hà18h. Tous les jours de juillet à septembre. Dégustation des vins du domaine et visite du vignoble.

Visites du Château Lagueloup, 2 et 4 rue de la Liberté .Portets – Musée du vin et de la vigne- Entrée au château de Mongenan 8euros, visite couplée avec dégustation gratuite 12 euros. Entrée gratuite pour les enfants jusqu’à 12 ans.

Cycle de conférences et d’animations, se reporter à la rubrique « Des idées pour éviter la télé… »

Pour en savoir plus : Château de Mongenan 33640 Portets. Tél : 05.56.67.18.11 –Fax : 05.56.67.25.82  Site Internet : www.chateaudemongenan.com . –Courriel :

 



[1] Le Château de la famille Montesquieu se troue àLa Brède, à quelques kilomètres de Portets.

[2] Presse écrite : Sud Ouest pages culturelles, Télé : france2 et France 3, Radio : France Inter.

[3] « Graves de Bordeaux » Ed. Jacques Legrand – « Toute honte bue » Ed..Albin Michel.


2 Replies to “Florence Mothe, historienne, romancière …”

  1. chère Florence,Merci de ton livre passionnant transmis par mon ami Vetro puis-je à mon tour t’envoyer Viollet Le Duc à Mongenan? amicalement Denis BD

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