Depuis plusieurs décennies, maintenant, le monde oscille de crises en crises : crise agricole, crise industrielle, crise de production, crise énergétique, crise financière, crise économique mondialisée…La crise étant par définition un moment violent, subit et décisif, elle va, elle vient, elle court le monde et à entendre nos politiques elle ne saurait tarder à finir !
La vérité est que nous sommes entrés dans un temps de mutation. C’est la fin , pour notre société, d’un cycle qui a commencé au XVIIème siècle, s’est renforcé au XIXème, sur la valeur travail et le progrès capable de résoudre tous les problèmes, et a engendré, deux siècles plus tard, cette société actuelle, en mutation en raison même de la question du changement climatique, devenue majeure pour notre survie :pollutions en tous genres, risques naturels, évolution du littoral, questions énergétiques et corrélées : déplacements de populations, conflits de territoires, questions d’habitat, alimentaires, de santé etc…
Parallèlement notre rapport au temps a changé. Tout va de plus en plus vite et les valeurs assises sur la durée ont volé en éclat. De moins en moins de travail à long terme, de plus en plus de divorces et de familles recomposées et de plus en plus de défiance envers les politiques… Ceux-ci, il est vrai, restent campés sur des valeurs devenues obsolètes, et cela est vrai plus particulièrement en France, compte tenu de leurs origines sociales, et de leur pérennité dans un système politique qui les empêchent de voir et d’entendre qu’aujourd’hui ce qui est revendiqué par le citoyen : la réalisation de soi-même qui passe aussi par la création.
Dans cette mouvance, un peu partout de nouvelles réflexions sur des modes de vie en transition, atypiques, plus solidaires, plus sociaux avec comme crédo « la sobriété heureuse » et alternatifs au système capitaliste, au dogme de la croissance et au techno-scientisme.
Dans le même temps, ailleurs, dans un monde où convergent les techno sciences : nanotechnologie, biotechnologie, information et cognition, les techno – prophètes annoncent l’avènement d’une « posthumanité immortelle ». Cette société est entrée dans la virtualité des nouvelles technologies. Là, où se prépare le cybermonde, là où « …La technique devient une religiosité, un techno-prophétisme, une voie de salut pour délivrer l’homme de ses anciennes limites posées désormais comme des pesanteurs. Exigence d’une liberté que plus rien ne borne sinon le désir. Les technologies sont vouées à libérer l’homme des contraintes corporelles, qu’elles soient biologiques ou culturelles. Elles ne sont plus uniquement perçues comme extérieures au corps, mais comme venant s’y substituer, le transformer en instrument plus efficace, éliminer des fonctions inutiles, etc… Le transhumanisme poursuit le rêve d’un homme non souffrant, non altéré par les émotions, non désirant, maître de lui-même et immortel. »[1]
Nous sommes déjà entrés dans une ère post-biologique. Après l’Homme prothèsé, l’Homme augmenté, on nous annonce :…que le monde verra bientôt le triomphe de robots pensants, infiniment complexes et efficaces, qui ne se distingueront de l’humanité courante sinon par leur perfection technique et leur abandon du corps[2]…la chair numérisée, rehaussée de prothèses et de puces électroniques, solution enfin tangible à l’immortalité, à l’affranchissement de toute limite physique, temporelle, spatiale…grâce aux nanotechnologies » ce qui fait dire à l’un de ces experts – prophètes que « la technologie risque de se retourner contre nous, sauf si nous fusionnons avec elle. Ceux qui déciderons de rester Humains et refuseront de s’améliorer auront un sérieux handicap. Ils constitueront une sous-espèces et formeront les chimpanzés du futur « article paru dans Libération le 12 mai 2002, il y a déjà 12 ans !)
Autrement dit, ce Technocorp, ou cyborg, porterait en lui les mutations sociales à venir : celle d’une classe sociale « augmentée », obligatoirement limitée, (ne serait-ce qu’en raison des coûts de ces transformations et robotisations), et qui ne pourrait qu’être dominatrice de cette autre partie de la société incapable de s’adapter ?
Pourquoi alors ? «… cette fascination pour les automatismes qui justifie l’appétit d’innovations technologiques d’aujourd’hui ?…on veut l’efficacité, une économie d’effort et d’attention, la compétition, la diminution des coûts de production… »
Pourquoi s’embarrasser de questions métaphysiques relatives à l’homme ? Il est plus urgent de satisfaire à l’urgence des impératifs économiques « …Voilà pourquoi la conscience est devenue encombrante et n’est plus invoquée pour faire la différence entre l’homme et la machine…Le robot est un être sans intériorité, voilà sa force pour qui souhaite optimiser la synergie des humains ![3] »
En 1965 déjà, l’auteur Aurel David écrivait : « …L’organisation du travail a introduit une sorte de chasse à l’homme dans l’usine. Le corps humain est le seul point faible d’un ensemble mécanique. Ce n’est qu’au moment où le dernier homme aura été chassé de l’usine que l’on pourra envisager le perfectionnement harmonieux et sans limites de l’ensemble des machines »[4]
Et bien, se dit Félicité…en prenant son café, dans son jardin baigné de cette si belle lumière de soleil, annonce du printemps, écoutant les oiseaux qui s’affairent à préparer leur couvée… Que voilà, un avenir radieux qui s’annonce pour l’humanité !
Félicité.
Brrr! Cela fait froid dans le dos!
Un “meilleur des mondes” qui nous pend au nez, une abomination!
Bonne séance de contemplation au soleil, Félicité!