Rentrée des Classes!

Posté le 12/09/2013 dans Histoire.

Le mois de septembre est le mois de la rentrée pratiquement pour tous. La longue pause du mois d’août, où chaque année la France est saisie par un état de  léthargie, est terminée. Les écoliers, les lycéens reprennent le chemin de leurs études, les bronzés de l’été reprennent du service, et nos députés regagnent l’hémicycle et retrouvent leurs habitudes, dont certaines rappellent celles des potaches qu’ils furent dans une autre vie.

Le jour officiel de la rentrée en général affiche complet. Ce jour étant passé, certains sèchent allégrement les séances chargeant quelques copains de les représenter voire de voter à leur place, à l’exception du jour où la télé est présente. Nul ne saurait manquer cet instant médiatique privilégié ! Il y a ceux qui prennent à la lettre le terme de « chambre » et s’adonnent régulièrement à une sieste réparatrice, tels de gros raminagrobis débonnaires, ils ouvrent un œil de temps à autre, prouvant ainsi qu’ils sont toujours bien vivants. Il y a les dissipés qui se chuchotent de bonnes histoires faisant fi du discours de l’orateur du moment. C’est en général des élus de l’opposition, qui entendant prouver  ainsi que ce que dit l’orateur ne peut être que billevesées. Il y a les curieux de l’actualité qui  profitent de l’instant pour faire leur revue de presse ; il y a les compulsifs qui n’arrivent pas à se couper de leur i.Pod et autres engins électroniques…De temps en temps, en cours d’années, une partie de l’hémicycle, la droite ou la gauche, c’est selon, se lève comme un seul homme et prend la porte le plus dignement possible, offensée par quelques propos de l’orateur du camp opposé !

Cela permet d’alimenter les gazettes, de faire parler les commentateurs, d’être répercuté aux comptoirs des bistros alors que dans le même temps, nos chers parlementaires, tous les courants confondus, se retrouvent et trinquent en toute convivialité à la buvette de la Chambre des députés !

On a envie de dire, et c’est tant mieux ! Cela fait partie du processus démocratique !

Lecteurs vous remarquerez que nous ne donnons que des exemples masculins. La raison en est que les femmes sont si peu nombreuses qu’elles finissent par passer inaperçues au milieu de cette assemblée de costumes cravates sauf si une jeune et jolie ministre ayant décidé de fêter le printemps, arrive, pimpante, avec une robe fleurie. Il y a alors comme un brouhaha qui va s’amplifiant de rang en rang, nos raminagrobis, soudain ragaillardis, ouvrent un œil égrillards, les commentaires fusent…normal, c’est le concert des potaches !

Il n’en fut pas toujours ainsi,  en 1789, les médecins qui faisaient partie de la Chambre s’inquiétaient pour la santé des députés fraîchement élus qui, semble-t’il, n’hésitaient pas à être présents en nombre, au risque de leur vie !Colette Lièvre

– illustration “Une queue de théâtre” dessin de Lavrate -collection privée Liliane et Louis Pariente-Editions Louis Pariente “Le Temps du paradis-Histoire du Mélodrame” Agenda 1995 pour les Laboratoires Knoll France.

 

« La santé des députés de 1789 »

…Les députés ne se doutaient pas qu’ils allaient demeurer loin de chez eux pendant deux ans et demi. Leurs conditions d’existence à Versailles d’abord, puis à Paris, vont provoquer des troubles de santé que nous relatent la correspondance privée ou les commentaires officiels de certains d’entre eux. Or, on oblige trop de monde à se réunir dans une salle dont l’air à la longue est vicié. Le 17 juin 1789, Guillotin, émet ainsi de vives réserves : « l’air pesant, pestilentiel  exhalé du corps de plus de 3000 personnes concentrées dans la salle produit infailliblement un effet funeste sur tous les députés » On sait même que deux députés René-Gilles Héliand, ex-changeur du roi et législateur et André Liquier, négociant à Saint-Jean-du-Bruel (Aveyron) devaient mourir au début de la session. Ont-ils été incommodés par l’air vicié ? Dans le cas d’Héliand cela ne fait aucun doute. L’air empuanti lui a causé un violent rhume que les médecins consultants ont d’abord qualifié de « fausse péripneumonie » ou de « fièvre humorale ». Le docteur Allard[1] vient au chevet du malade qu’emporte une « fluxion de poitrine ».

Mais certains d’entre eux sont malades lorsqu’ils arrivent à Versailles…Quatre députés du Poitou sont malades en 1789. L’un d’eux est remplacé par Cochon de Lapparent. Félix Filleau meurt en avril 1790, à l’âge de 51 ans.

 Devait-on incriminer, comme certains n’ont pas manqué de le faire, la qualité de l’air des salles ? Marie-Félix Faulcon, chevalier de la Parisière, avocat et député du Poitou, futur rédacteur de la Charte constitutionnelle, et remplaçant de Filleau à l’Assemblée déclare que « les crachements de sang, la constante hémorragie nasale qui accompagne ses migraines », il en voit la cause dans «l’air vénéré » qu’on respire dans la salle. Le 23 août 1790 il est obligé de quitter ses collègues après le discours de Robespierre, pour aller respirer dans le plus proche jardin : les Tuileries.

Mirabeau aussi aurait pu s’en plaindre : l’air contaminé avait rapidement dégradé sa santé. Il souffrait ainsi,  pendant les séances, d’une douloureuse « ophtalmie rebelle », comme son collègue Gaultier de Biauzat, ce qui l’obligeait à conserver sur les yeux une sorte de bandeau qu’il croyait capable de diminuer la douleur.

C’est encore l’air vicié que Maupetit accuse d’avoir causé la fièvre forte dont il souffre, laquelle ne l’empêchera pas d’aller signer le Serment du jeu de paume. Continuons cette énumération : un autre député, Enjubault de La Roche voit également dans l’air « méphitique » de la salle et la température trop élevée la cause de tous les maux : rhumes, névralgies, saignements de nez. Bouchotte ou Legendre, en février 1790, reprendront ces critiques, attribuant l’absentéisme pour cause de maladie à l’air empoisonné de la salle de réunion : « Quant aux autres, chacun craignait son tour ; et quand nous en serions exempts, il serait impossible que nous tenions encore longtemps à la fatigue du travail et des séances »

Et d’autres encore seront atteints des mêmes maux : l’abbé Pierre Fougères, malade en juin 1790 ; Thomas Lindet, fatigué par les séances de l’Assemblée, Jacques Jallet à qui Gallot conseille d’aller soigner ailleurs sa fièvre catarrheuse, mais qu’une attaque d’apoplexie emportera bientôt en août 1791, et surtout le médecin André Pélissier[2]qui rentrera chez lui à Saint Rémy, pour succomber à une maladie de poitrine ». Philippe Deville. Les Médecins pendant la Révolution. P.43 Editions Louis Pariente. Paris.



[1] Louis-François Allard (1734-1819) Sénéchaussée de  l‘Anjou. Médecin à Château-Gontier, il avait la réputation d’être plein de bon sens et d’une grande probité. Il joua un rôle important lors des grandes épidémies du Poitou, qui firent un millier de morts entre 1779 et 1780 selon une lettre de l’intendant Necker, car l’élection du Château-Gontier avait été la plus atteinte. En 1768 déjà, il avait été envoyé avec son confrère de Craon, Esnuée-Lavallée, par l’Intendant et le docteur Dupichard dans le Craonnais ravagé par une épidémie de dysenterie .Ils s’y étaient heurtés à « l’indocilité naturelle des habitants qui leur faisait refuser toute forme de remèdes »(FR.Lebrun) Élu à la Constituante et membre du Comité de Salubrité, Allard se montera un patriote ardent mais libéral. Il siégera à gauche mais ne votera ni le veto ni la constitution civile du clergé. Après la session, il semble qu’il ait repris sa profession sans être jamais inquiété.

[2] André Pélissier(1742-1791) de la Sénéchaussée d’Arles. Docteur en médecine à Saint Rémy, il a laissé le souvenir d’un médecin instruit et distingué. Il fut l’auteur d’un catéchisme du tiers, plusieurs fois réédité et passe pour avoir donné des soins à Mirabeau. Malade il se retirera et mourra d’une maladie de poitrine le 19 mai 1791.On le confond souvent avec son fils Denis-Marie, suppléant à la Législative et conventionnel.


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